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[Tout arrive...] Saakachvili, sous mandat d’arrêt, nommé gouverneur d’Odessa…

Publié le par Felli Bernard

Guiorgui Margvelachvili, lors d’une conférence de presse au palais présidentiel le 13 mai 2014 à Tbilisi
Guiorgui Margvelachvili, lors d’une conférence de presse au palais présidentiel le 13 mai 2014 à Tbilisi

10

juin

2015

[Tout arrive...] Saakachvili, sous mandat d’arrêt, nommé gouverneur d’Odessa…

On est bien d’accord : en 2008, il y a un conflit armé entre la Russie et la Géorgie – dont le président a fini par faire tirer son armée sur des troupes russes… On ne va même pas chercher à détailler le pourquoi du comment à ce stade.

Et là, Porochenko vient tranquillement de donner la nationalité ukrainienne à l’ancien président géorgien, et de le nommer à la tête d’une région très sensible d’Ukraine, où des Russes ont péri brulés il y a un an (hmmm, et l’enquête au fait ?…. )

C’est moi, ou c’est un sacré message de paix aux Russes ça ?

Ukraine: le président géorgien accuse Saakachvili d’avoir “insulté” la Géorgie

Le président géorgien Guiorgui Margvelachvili a qualifié d’”insulte” à la Géorgie la décision de son prédécesseur Mikheïl Saakachvili d’accepter d’être nommé à la tête de la région ukrainienne d’Odessa, après avoir pris la citoyenneté ukrainienne.

“Ce comportement indécent est incompréhensible”, a déclaré M. Margvelachvili dans des commentaires télévisés diffusés dimanche soir. M. Saakachvili, 47 ans, qui s’était vu accorder le week-end dernier la citoyenneté ukrainienne, “a insulté notre Etat”, a-t-il dénoncé. “Il y a des valeurs plus importantes que la carrière, et parmi elles figure la nationalité de son pays”, a ajouté le président géorgien. Selon la loi géorgienne, un Géorgien qui accepte la citoyenneté d’un autre pays perd automatiquement sa nationalité géorgienne. Cette perte doit toutefois être confirmée par décret, ce qui dans le cas de M. Saakachvili n’a pas été fait pour l’instant. Il reste donc citoyen géorgien. “Que cela soit pour lui comme une épée de Damoclès. Cela sera une décision politique et nous la prendrons quand nous voudrons”, a déclaré la ministre de la Justice géorgienne, Tea Tsouloukiani.

Ennemi juré de Vladimir Poutine, M. Saakachvili a été nommé samedi gouverneur de la région stratégique ukrainienne d’Odessa, avec pour objectif d’y préserver la “souveraineté” du pays et de lutter contre la corruption.

Cette nomination a suscité la fureur de la Russie, accusée par Kiev et les Occidentaux de soutenir militairement les séparatistes prorusses dans l’Est de l’Ukraine, ce qu’elle nie. Président de la Géorgie de 2004 à 2013, Mikheïl Saakachvili, arrivé au pouvoir à l’issue de la “Révolution de la rose” – premier d’une série de soulèvements populaires dans des pays de l’ex-URSS -, a toujours été très proche des autorités pro-occidentales de l’Ukraine. M. Saakachvili est notamment crédité de progrès dans la lutte contre la corruption, mais a été accusé par ses détracteurs de dérives autoritaires. Il est poursuivi en Géorgie pour “abus de pouvoir”, et dénonce de son côté des persécutions politiques.

Source : Le Parisien, le 1er juin 2015.

Ukraine: le pouvoir irrite un peu plus la Russie en nommant Saakachvili à Odessa

Le président ukrainien a choisi de nommer Mikhaïl Saakachvili, ancien chef d’État géorgien, gouverneur de la région d’Odessa. Personnage éruptif et contesté, il avait endigué la corruption en Géorgie et engagé de nombreuses réformes. Jusqu’en 2008, quand la guerre en Ossétie du Sud en a fait la bête noire du Kremlin voire son ennemi n°1.

La nouvelle a été annoncée samedi 30 mai et aussitôt mise en ligne sur le site internet de la présidence d’Ukraine. L’ancien président géorgien Mikhaïl Saakachvili est nommé gouverneur de la région d’Odessa, dans le sud du pays, sur les bords de la mer Noire. La veille, il s’était vu octroyer, in extremis, la citoyenneté ukrainienne. Sa mission ? Préserver la « souveraineté » du pays et lutter contre la corruption. « Nous avons besoin de nouvelles règles, de nouvelles personnes, d’une nouvelle direction, afin d’attirer davantage de touristes et – ce qui est plus important – davantage d’investisseurs à Odessa », a déclaré Saakachvili lors de son investiture. Le nouveau gouverneur est allé jusqu’à annoncer son projet de faire de cette ville portuaire « la capitale de la mer Noire » et a promis de changer radicalement la vie dans la région.

Parmi les élus locaux, certains ont réagi positivement à cette nomination. Mais le maire d’Odessa, Guennadi Trukhanov, s’est montré sceptique, comme le rapporte le site d’information ukrainien ZN UA : « Nous avons vu le résultat des réformes que Saakachvili a pu mener en Géorgie dans un court laps de temps, mais je ne dirais pas que l’on peut reproduire l’expérience d’un pays à l’autre. » D’autres, comme le député Nikolaï Skorik, ancien gouverneur d’Odessa lui-même et aujourd’hui membre de l’opposition, ont vivement critiqué l’arrivée de Saakachvili. « Cela fait un an que les gens de son équipe travaillent pour le gouvernement. Et où est la réforme ? Elle n’est pas là. Eux-mêmes commencent à nous enliser dans des scandales de corruption. Je ne crois pas que Saakachvili va vaincre la corruption dans les douanes et réussir à faire appliquer la loi. Je ne crois pas à l’investissement. Dans un pays en guerre, l’argent ne vient pas. »

Si elle peut surprendre, la nomination de l’ancien président géorgien ne tombe pas du ciel. Saakachvili faisait partie des soutiens étrangers à la révolution du Maïdan depuis son commencement, et c’est un homme qui connaît bien l’Ukraine, pays où il a fait son service militaire à la toute fin de l’URSS et où il a suivi ses études, à cette époque où les citoyens soviétiques circulaient d’une république à l’autre. C’est d’ailleurs sur les bancs de l’université de Kiev qu’il avait rencontré Petro Porochenko, l’actuel président ukrainien, lequel fait appel à lui au lendemain de son élection, en mai 2014, pour le conseiller.

Quelques mois plus tard, Porochenko le nomme à la tête du « conseil international consultatif des réformes », un comité qui compte un Américain et plusieurs anciens ministres européens – des personnalités essentiellement issues d’Europe centrale, un Allemand… mais aucun Français. Saakachvili est donc aux premières loges du pouvoir ukrainien depuis déjà plusieurs mois et ce, en même temps qu’un certain nombre d’autres personnalités étrangères.

Petro Porochenko, en voulant s’attaquer à une corruption endémique dans un pays où intérêts des oligarques et stratégies politiques sont intimement liés, a cherché en effet des personnalités détachées du monde des affaires ukrainien. Ont ainsi été nommés en décembre dernier trois ministres étrangers, comme nous le racontions dans Mediapart : l’Américaine d’origine ukrainienne Natalie Iaresko au ministère des finances, le Lituanien Aivaras Abromavicius à l’économie, et le Géorgien Alexander Kvitachvili à la santé.

D’autres Géorgiens qui avaient gouverné aux côtés de Saakachvili dans les années 2000 ont également rejoint l’exécutif, comme Eka Zgouladzé, affectée au poste de vice-ministre de l’intérieur, qui n’est autre que la mère de la grande réforme de la police géorgienne, celle qui a imposé, dans un pays qui se relevait à peine de l’effondrement du bloc soviétique, une réduction drastique des effectifs, une nouvelle formation des policiers, une fusion des services de police avec l’ancien KGB, la fin des pratiques de corruption et une lutte acharnée contre le crime organisé. Les observateurs parlaient alors d’une « révolution culturelle » menée par une jeune ministre à peine trentenaire…

Enfin, d’autres Géorgiens ont rejoint ces derniers mois des institutions ukrainiennes, comme le parquet et le bureau anticorruption issu de la révolution du Maïdan. Figure également, parmi les proches conseillers du gouvernement à Kiev, Guiorgui Vashadzé, député géorgien et ancien vice-ministre de la justice.

Il faut dire qu’à l’image d’Eka Zgouladzé, les membres de l’équipe de Saakachvili se sont distingués pendant les années 2000 par des réformes poussées, s’attaquant notamment à la corruption et à la bureaucratie, et favorisant la libéralisation de l’économie. Le pouvoir à Tbilissi s’est également laissé aller à des dérives, il a cherché à museler l’opposition et les médias et a été fortement contesté, mais la lutte contre la corruption engagée alors par celui que les Géorgiens appelaient « Micha » fut l’un de ses principaux succès et il a été largement applaudi pour cela par différentes organisations internationales.

L’épouvantail qui osa défier l’armée russe

Ainsi, en 2012, un rapport de la Banque mondiale sur la lutte contre la corruption dans l’administration menée entre 2003 et 2011 en Géorgie saluait les progrès de Tbilissi, montrant que les autorités étaient parvenues à mettre fin à « un cercle vicieux de corruption endémique » avec des réformes « appropriées et décisives ». Il indiquait que la méthode employée par l’exécutif de Saakachvili gagnait à être appliquée dans d’autres pays de l’espace postsoviétique, tant sa politique mettait à bas le mythe d’une corruption inscrite dans la culture du pays. Le rapport soulignait que des progrès significatifs avaient été enregistrés dans l’administration fiscale, les services de police, les douanes, mais aussi l’université, le secteur énergétique, les pratiques des entreprises, et les rapports entre usagers des services publics et fonctionnaires.

Mikhaïl Saakachvili a présidé la Géorgie de 2004 à 2013. Il a tout pour être la bête noire du Kremlin : il accède au pouvoir à l’issue du premier des soulèvements populaires qui ont ébranlé, à partir des années 2000, le fragile équilibre postsoviétique. Atlantiste convaincu, passé par les universités américaines après sa formation en Ukraine, il mène en outre, parallèlement aux réformes, une politique ostensiblement pro-américaine. Il fait de son pays l’un des plus gros contributeurs à la coalition militaire en Irak, envoyant jusqu’à 2 000 hommes en 2007, joue la carte du rapprochement européen, espère une adhésion à l’Otan… Et il finit par aller au clash avec Moscou.

Août 2008. Des incidents éclatent à la frontière entre des séparatistes géorgiens soutenus par la Russie et l’armée de Tbilissi. Saakachvili lance alors l’assaut contre les forces militaires russes. Réaction immédiate du Kremlin : en huit jours, le sort de deux provinces frontalières est plié, Tbilissi obligé de reculer devant l’avancée des troupes russes, c’est un lamentable échec pour le président géorgien. La guerre éclair débouche sur l’« indépendance » de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, deux États aujourd’hui reconnus par Moscou.

Même si l’on apprendra quatre ans plus tard, de l’aveu de Vladimir Poutine lui-même, que le Kremlin avait en réalité planifié cette action deux ans en amont, pour Moscou, Saakachvili n’en est pas moins l’épouvantail qui osa défier l’armée russe. Rappelons cette heureuse formule que Vladimir Poutine avait eue à son sujet pendant ces quelques jours de Blitzkrieg : « Saakachvili, je vais le faire pendre par les couilles »

Sa nomination à la tête de la région d’Odessa est-elle une provocation de la part de Kiev à l’égard de Moscou ? Tatiana Jean, chercheuse et responsable du centre Russie – Nouveaux États indépendants à l’Ifri, l’institut français des relations internationales, croit plutôt que c’est un « pied de nez », et que le facteur russe, cette fois-ci, n’a pas joué, ou alors « c’était le facteur 45 »

« Ce que montre cette nomination en réalité, explique la spécialiste à Mediapart, c’est qu’en Ukraine, le pool de managers efficaces, non corrompus, non liés à des intérêts économiques et financiers est extrêmement restreint. Certes, Saakachvili n’est pas le plus mauvais des managers. Mais cette décision étonnante, ambiguë, et qui ne peut évidemment qu’irriter Moscou, est avant tout liée au déficit de compétences dans le pays. »

Aucune manifestation de rejet n’a éclaté pour l’instant dans la ville portuaire ukrainienne. « C’est un signal fort, estime Tatiana Jean. C’est une façon de montrer qu’Odessa n’est pas une ville russe, de réaffirmer l’appartenance ukrainienne de la ville : voyez, on peut nommer Saakachvili gouverneur et personne ne proteste. » La nomination de Saakachvili, au fond, est un terrible aveu : celui de l’impossibilité de trouver, en interne, des personnes au-dessus de la mêlée pour mener les réformes. Mais c’est aussi la marque d’un certain isolement de Kiev. Si le pouvoir tend la main à des personnalités de l’Est, cela montre, en creux, la frilosité de l’Ouest européen à prêter main forte aux Ukrainiens dans la conduite des réformes.

Les soutiens de Porochenko, en tout cas, applaudissent. À les croire, la nomination de Saakachvili n’a aucune raison d’agacer le Kremlin. « Je ne vois pas comment les relations entre l’Ukraine et la Russie peuvent empirer, explique le député Oleg Goncharenko à Odessa, joint par Mediapart. Nous sommes déjà en guerre, les relations n’ont jamais été aussi mauvaises, Poutine n’a pas besoin de cela pour faire ce qu’il veut en Ukraine ! »

Ce député élu en novembre dernier sur les listes du « bloc Porochenko », et anciennement président du conseil régional d’Odessa, est convaincu que Saakachvili peut exporter son expérience en Ukraine. « L’oblast d’Odessa constitue l’une des plus grandes régions d’Ukraine, et c’est la plus longue frontière extérieure du pays. C’est une région pleine de ressources, qui a un gros potentiel. L’expérience d’un étranger comme Saakachvili peut non seulement améliorer la situation localement, mais fournir un exemple et contribuer ainsi aux réformes au niveau national. » L’élu le reconnaît pourtant, si les pro-Maïdan dont il fait partie nourrissent beaucoup d’espoir face à cette nomination, les pro-russes de la région ne s’en réjouissent absolument pas.

La région stratégique d’Odessa, si elle est restée à l’écart de la guerre qui a fait à ce jour plus de 6 200 morts dans le Donbass, est traversée par de vives tensions. Logée entre la Transnistrie, province sécessionniste de Modalvie où stationnent des troupes russes, et la Crimée, annexée par la Russie en mars 2014, la ville d’un million d’habitants en grande partie russophone a été aux premières loges des soubresauts qui ont suivi l’effondrement du pouvoir Ianoukovitch, l’an dernier.

Le 2 mai 2014 en effet, un incendie embrase la Maison des syndicats… 48 militants pro-russes y périssent, sans compter les nombreux blessés. Pour l’heure, un seul activiste pro-Kiev a été inquiété dans cette affaire, l’enquête judiciaire semble au point mort, et de nombreux pro-Russes se disent persécutés, comme le raconte ce reportage du Monde publié le mois dernier. De leur côté, des citoyens, principalement des journalistes, ont formé le « comité du 2-Mai » pour mener leurs propres investigations, s’efforçant d’être le plus impartiaux possible. Leurs conclusions ont écarté le scénario du massacre prémédité, mais racontent l’enchaînement d’agressions mutuelles et l’impuissance et la passivité des forces de police ukrainiennes.

Le déclin du clan Kolomoïski

Aujourd’hui, l’atmosphère reste tendue. Des explosions éclatent parfois ici ou là dans Odessa, et si le soutien aux séparatistes de l’Est s’est en partie estompé devant l’ampleur du conflit, de nombreux habitants de la région s’estiment lésés et nourrissent une rancœur face à l’absence de condamnations, un an après le tragique événement. De nombreux anciens affidés au président déchu Viktor Ianoukovitch sont encore dans les rouages du pouvoir local et ne faciliteront certainement pas la tâche du nouveau gouverneur parachuté.

Odessa, ville portuaire au passé riche et aux nombreuses ressources, constitue un point d’autant plus sensible que si jamais le Kremlin décidait d’étendre les troubles en Ukraine, c’est sans nul doute dans cette direction-là qu’il regarderait après Marioupol, l’autre port de la mer Noire encore sous contrôle ukrainien. Odessa, comme Mediapart le relatait à travers un reportage en septembre dernier, fait partie du territoire de la Novorossia, cette « Nouvelle Russie » de l’époque impériale, invoquée depuis l’an dernier par Vladimir Poutine pour mieux asseoir les nouvelles ambitions de la Russie postsoviétique.

Le Kremlin n’a d’ailleurs pas manqué de railler les nouvelles fonctions de l’ancien chef d’État, tandis que la nouvelle a fait les choux gras des médias russes pendant le week-end. « Saakachvili à la tête de la région d’Odessa. Le numéro de cirque continue… Pauvre Ukraine », a tweeté le premier ministre Dmitri Medvedev. « Saakachvili accusé de crimes contre le peuple géorgien est nommé gouverneur d’Odessa où les néonazis ont brûlé des gens en toute impunité, a tweeté de son côté le délégué aux droits de l’homme du ministère russe des affaires étrangères, Konstantin Dolgov. C’est un symbole profond de la démocratie à la Kiev observée avec bienveillance par l’Occident. »

« Saakachvili à la tête de la région d’Odessa. Le numéro de cirque continue… Pauvre Ukraine », tweet de Dmitri Medvedev

Dans ce contexte, accepter le poste pour l’ancien président Saakachvili relève du défi. Voire d’un coup de folie. Un ancien ministre en poste à Tbilissi sous la présidence Saakachvili nous le confirme : l’ancien chef d’État a besoin d’être « dans le feu de l’action », de « se confronter à la difficulté », de « se sentir nécessaire ». Il témoigne d’un attachement particulier à Odessa. La ville présente en effet des points communs avec Batoumi, ce port géorgien de l’autre rive de la mer Noire, dont Saakachvili voulait faire une vitrine prospère de son pays. C’est sans doute cela qui l’inspire quand il parle de développer le port de marchandises ukrainien. Et c’est dans les rues d’Odessa, au début du XXe siècle, qu’est née cette chanson russe, Kostia Mariaka, « Konstantin le marin », que l’ancien président géorgien a souvent mentionnée comme son air préféré…

Mais il est peu question de sentiments ici. Ambitieux, le nouvel homme fort d’Odessa, qui espère bien retrouver un jour des fonctions politiques dans son propre pays, joue sur ce poste son avenir politique. « S’il se plante sur les réformes à Odessa, il sera fini politiquement. C’est lui – et non pas les Ukrainiens – qui porte tous les risques de cette nomination : risque d’échec sur les réformes, mais aussi risque vital pour sa personne ! », lâche un de ses anciens collaborateurs à Tbilissi.

© Saakachvili, “symbole profond de la démocratie à la Kiev observée avec bienveillance par l’occident” pour Konstantin Dolgov

Étant donné les vents contraires qui soufflent à Tbilissi depuis la fin de son second mandat, Saakachvili, de fait, n’a pas droit à l’erreur. Actuellement poursuivi en Géorgie pour recours abusif à la force lors des manifestations de contestation de son pouvoir, en 2007, il vivait en exil aux États-Unis avant d’être appelé par Porochenko.

À l’annonce de sa nomination à Odessa, la réaction de son successeur à Tbilissi n’a pas été tendre. Pour Guiorgui Margvelachvili, Mikhaïl Saakachvili est le traître à la patrie : « L’ancien président a insulté son pays et l’institution présidentielle. Je ne peux pas comprendre un tel comportement indigne », a-t-il déclaré à une radio russe. Selon la loi géorgienne, accepter la citoyenneté d’un pays tiers conduit, de fait, à la perte de la citoyenneté géorgienne. Mais cette perte doit être confirmée par décret, ce qui n’a pas été fait pour l’instant dans le cas de Saakachvili. Or si ce dernier se voyait privé de sa citoyenneté géorgienne, cela entraînerait la levée des poursuites judiciaires actuellement en cours contre lui : ce n’est pas forcément ce que souhaite l’exécutif en poste aujourd’hui à Tbilissi…

Détesté par Moscou, sous le coup de poursuites judiciaires dans son propre pays, sur le retour d’un exil aux États-Unis, Saakachvili est donc en train d’écrire une nouvelle page surprenante de son parcours. Côté ukrainien, cette nomination confirme le déclin amorcé ces derniers mois du clan de l’oligarque Igor Kolomoïski, l’ancien gouverneur de la grande ville de l’est de Dnipropetrovsk démis de ses fonctions en mars. Le gouverneur d’Odessa sortant est en effet le milliardaire Igor Palytsia, qui n’est autre que le bras droit de Kolomoïski, entré en fonctions l’an dernier après l’incendie de la Maison des syndicats.

Ces derniers mois, le gouvernement a engagé un bras de fer pour reprendre le contrôle d’actifs gaziers et pétroliers et réduire l’influence des oligarques. Kolomoïksi semble accepter le jeu – du moins officiellement. Il s’est retiré de ses fonctions politiques pour mieux se concentrer sur ses affaires et notamment sur son empire médiatique. Mais ce tacticien, 2e ou 3e fortune d’Ukraine, n’a certainement pas dit son dernier mot. Nul doute que d’importantes luttes d’influence continuent de se jouer en coulisses, dans l’ombre du conflit qui se poursuit, dans l’est du pays.

Source : Amélie Poinssot, pour Médiapart, pour les non-abonnés, le 3 juin 2015.

Bonus :

“La nomination de Mikheïl Saakachvili a été violemment critiquée par Moscou avant même d’être officielle. Le délégué aux droits de l’homme du ministère russe des affaires étrangères, Konstantine Dolgov, a ainsi écrit sur son compte Twitter : « Saakachvili accusé de crimes contre le peuple géorgien est nommé gouverneur d’Odessa où les néonazis ont brûlé des gens en toute impunité : c’est un symbole profond de la démocratie à la Kiev observée avec bienveillance par l’Occident ».”

La guerre éclair de Géorgie, en août 2008, et la perte des deux provinces séparatistes © DR

La guerre éclair de Géorgie, en août 2008, et la perte des deux provinces séparatistes © DR

Mikheïl Saakachvili

Mikheïl Saakachvili

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